L'utopie (4)

Publié le par Nÿd Drakan

(quelqu'un avait remarqué qu'il n'y a pas d'utopie(3) ? XD)

L'utopie

Bien ! Je suppose que vous serez tous très heureux d'apprendre que, si vous avez lu mes deux précédents articles sur l'utopie, vous êtes absolument calés sur ce qu'il faut en savoir !
M'enfin, c'est bien de pouvoir parler d'utopie, mais recrachez de la théorie sans exemple devant votre grand-mère, et l'effet voulu ne sera pas forcément au rendez-vous. Voilà trois exemples parmi tant d'autres qu'il me paraît intéressant d'étudier. Comme ça, vous pourrez faire comme si vous les aviez lues !

II. Quelques exemples d'utopie
A. Thomas More: Utopia

Commençons par le commencement; l'utopie de More. C'est pas compliqué, c'est la première utopie jamais écrite !

1. C'est qui, More ?
Déjà, il a vécu de 1478 à 1535; il a vu le début de la Renaissance, en gros. Il était donc contemporain de Machiavel, de Rabelais: c'était un ami d'Erasme.
Il était juriste et historien à la cour d'Henri VIII - ce qui lui coûta d'ailleurs la vie. C'est qu'il était fidèle au catholicisme, le pauvre, et quand le roi se convertit à l'anglicanisme, le pauvre More perdit la tête le 6 juin 1535. Pour la petite histoire, il a signalé à l'assemblée que l'échafaud était branlant, et dit au bourreau: "Mon cou est très court, prend garde à ne pas couper de travers !"
À part sa, il était très influencé par Platon; il avait lu La République, où la société est idéale, très hiérarchisée, et dirigée par un philosophe-roi. Ça n'a pas grand chose à voir avec son utopie, mais l'idée est très certainement partie du principe de société idéale.
Comme Erasme et Rabelais, il a aussi connu l'influence de l'évangélisme. Il a beaucoup contesté la richesse de l'Église, idée que l'on retrouve également dans son utopie. 


2. Utopia (1516)
Passons aux choses sérieuses ! L'Utopia, c'est un bouquin en deux parties.
La première se présente sous la forme d'un dialogue entre More et un certain Raphaël, un intellectuel voyageur... (je sais, c'est la grande classe) Ce dialogue est l'occasion d'une description critique d'une Angleterre inégalitaire, avec une hiérarchie sociale propriétaires/pauvres injuste...
La seconde est la description d'une "étrange république" fondée sur l'abolition de la propriété privée et de tout commerce impliquant de l'argent. (ouch, ça sent le communisme...)
C'est une société très libérale, avec peu de lois, où il n'existe aucune classe sociale. Les dirigeants sont des volontaires qui sont renouvelés tous les ans. Les biens sont distribués en fonction des besoins, les deux sexes sont égaux... Tous les utopiens accomplissent un service agricole de deux ans pour assurer la consommation des villes (ça sonne maoïste, hein ?). Les artisans fabriquent des objets qui sont distribués par les magistrats. On ne travaille que six heures par jour, parce qu'à partir du moment où tout le monde travaille, c'est suffisant. Le reste du temps, on épanouit ses qualités intellectuelles.Pour les repas, la table est commune; personne ne se goinfre. Comme le luxe est un signe d'inégalité, on utilise l'or pour faire des pots de chambre et les bijoux pour faire des jouets aux enfants. Les vêtements sont des uniformes faits avec de la laine ou de la toile.
Il y a aussi des esclaves, mais ce sont des prisionniers de guerre... Ces dernières étant purement défensives, bien sûr.


B. Rabelais et l'Abbaye de Thélème
1. Petite histoire sur Rabelais
Ça n'a rien à voir, mais j'avais la flemme de vous faire une biographie de Rabelais. En contrepartie, je vous raconte une anecdote. Rabelais, revenant de Rome, passe une nuit dans une auberge dans la région de Lyon; au moment de partir pour rentrer à Paris, notre cher écrivain se rend compte qu'il est sans le sou. Qu'à cela ne tienne ! Il écrivit "Poison pour le Roi et pour la Reine" sur des sachets de poudre. Il se fit arrêter et conduire à Paris par la police - aux frais de l'état, donc ! François Ier, qui devait avoir beaucoup d'humour, le relâcha à l'arrivée. De cette histoire est tirée l'expression "le quart d'heure de Rabelais" (expression que l'on retrouve dans Un Amour de Swann de Proust), devenue aujourd'hui "passer un sale quart d'heure". Trop fort, non ?

1. L'Abbaye de Thélème
C'est en fait le chapitre 57 de Garguantua (1534): "Comment étaient réglés les Thélémites". Cette abbaye est une antithèse des abbayes du XVIe: elle était mixte. Cette fois, nous sommes en présence d'une utopie de la liberté; il n'y a qu'une seule loi: "fais ce que voudras". Par contre, il n'y a rien d'égalitaire; il n'y a que des nobles, avec le sens de l'honneur, de l'autre (il ne se nuisent pas les uns les autres), et de l'émulation; on rivalise pour le meilleur. Et c'est tout ce qu'il y a à dire pour le moment; j'en reparlerai probablement si je fais un chapitre sur la guerre.

C. Fourier et son Phalanstère
1. À propos de Charles Louis Fourier
Sachez déjà que non, ce n'est pas l'inventeur de la fourrière; il était mathématicien. Il a vécu de 1772 à 1837 - un contemporain de Victor Hugo ! Bon, avec lui c'est pas compliqué, il a contesté à peu près toute la civilisation. Le couple traditionnel, parce que la femme y était esclave et qu'on épousait pas celui/celle qu'on aime, la misère ouvrière, le travail qui passait pour une punition... Bref, pour lui, le monde dans lequel il vivait était un monde sans ordre naturel, où il était impossible de vivre libre. Je dois avouer que son utopie était un peu folle, mais de cette idée ont découlé des inventions vraiment importantes, comme les crèches, qui ont permis aux femmes de s'émanciper pas mal.

2. Le Phalanstère
"Je vous recommande la description du Phalanstère comme le plus efficace des vomitifs." - Cioran.

Le principe du Phalanstère est fondé sur le concept du libre jeu des passions. En gros, les hommes et les femmes se rassemblent en fonction de leurs passions. "Le vrai bonheur ne consiste qu'à satisfaire ses passions", a dit Fourier. Avant de développer son utopie, il a d'abord décrété qu'il existait 12 passions, que nous n'avons pas en nous au même degré; il en a déduit qu'entre deux personnes, il y avait 810 combinaisons possibles. 810 hommes, 810 femmes, et hop: on prend 1620 personnes et ça fait un phalanstère. (ne me demandez pas ce qu'il fait de l'homosexualité, ça ne devait pas encore être dans les moeurs)
Pour les curieux, voilà les douze passions:
5 sensitives (les cinq sens, quoi)
4 affectives; l'amour (passion dérivée de ça, la haine "Amour et haine sont les deux faces d'une même passion" - Dostoïevski), l'amitié, l'ambition (l'étymologie, c'est la recherche de soutien des autres pour gagner des votes, il y a donc une dimension affective !), et le familisme (l'esprit de famille)
3 distributives: la cabaliste (la passion de l'intrigue, la recherche de l'argent...), l'enthousiasme (passion de la justice), et la papillonne (la passion du changement)
Voilà ! En théorie vous les avez toutes, de manière plus ou moins hiérarchisée, et l'amour de votre vie a le même ordre de passions. (voilà, vous savez tout sur le fonctionnement de Meetic.com ! je sors)
Bon, alors le coup des passions fonctionne pour l'amour, mais pas que. Le travail se fait en fonction des passions; l'enthousiaste sera magistrat, le sensitif s'occupera des repas... Comme ça, il y a très peu de concurrence, chacun fait ce qui lui plaît, tout ça...
Il n'y a pas de familles non plus; les enfants sont élevés en commun dans les fameuses crèches. Il n'y a de professeurs que pour les "savantins précoces", le reste des enfants apprend en suivant un enseignement mutuel; chacun a quelque chose à apprendre aux autres ! (à 3 ans, j'adorerais voir ça !)
Et puis, tout le monde avait une activité commune; l'opéra ! C'était l'emblème de l'esprit d'unité, dans le sens où l'opéra, au XIXe, était considéré comme la synthèse de tous les arts; danse, musique, peinture, harmonie, mesure...

Bon, ça a été un bide total, désolée pour ceux que ça intéressait ! :p


Pour plus de détails, il suffit de me demander en commentaire !

Publié dans Culture Générale

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